Les dernières décennies
ont charrié avec elles une pléthore de phénomènes touchant à divers aspects de
la vie des jeunes de la ville de Goma. A coté de la traditionnelle Religion
Kiteni, ou la SAPE, évolue un autre phénomène, non moins récurrent pourtant, le
phénomène Kishakoshi.
Le Kishakoshi, un
terme dérivé du mot français sacoche, désigne un homme élégant, beau, et riche
par-dessus le marché, qui se divertit, en contre partie de son argent, avec des
filles relativement jeunes. Voilà la définition initiale du Kishakoshi qui,
dans ses débuts, était encore aperçu comme déplacé et contraire aux usages.
Cinq etapes de l'evolution du Kishakoshi
Il s'agissait
d'abord d'une affaire de jeunes filles reconnues socialement comme
professionnelles de sexe et sans familles pouvant prendre en charge leur
éducation.
Peu à peu, les
poissons allant où va l'eau, le phénomène a pris de l'ampleur. Les jeunes filles
sans autre occupation que les travaux ménagers ont constitué la deuxième étape
du kishakoshi. Devenant un peu plus tolérant, le phénomène a étendu son champ
en charriant dans son lot de jeunes hommes pas forcément opulents mais pouvant
quand même, au moyen de leur argent, entretenir des rapports constants avec un
nombre donné de jeunes filles. Cela constitue le troisième palier de l'évolution
du Kishakoshi.
Petit à petit l'oiseau
fait son nid, dit-on. A côté, les nids des oiseaux diffèrent selon la taille de
leurs occupants. Est venu le courant de l'emancipation de la femme, avec la marée
de slogans qu'elle a apportés. "Toutes les filles à l'école". Et les
filles dont les parents n'ont pas assez de
moyens pour supporter leurs études? Certaines vont quand même à l'école elles
aussi, mais avec le seul espoir de tomber sur une vieille sacoche, suffisament
large et pas assez avare, qui leur permette un confort donné et leur procure un
prestige qui soutienne la comparaison avec leurs collègues provenant des
familles passablement aisées. Cette catégorie
de filles est devenue tellement rutilante qu'elle entraine dans le phénomène leurs
camarades des "familles aisées", ce qui n'a rendu le courant que plus
complexe. C'est ce qui semble expliquer le fait que bien des étudiantes se
ressourcent dans les bishakoshi –dans l’acception commune, pluriel du mot
kishakoshi. C'en est la quatrième étape.
Le cinquième stade
de l'évolution du phénomène Kishakoshi est marqué par l'adhésion des femmes
mariées. "Si toutes les filles à l'école, alors toutes les femmes au
boulot", s’est plu à dire un sage, un peu taquin, celui-là !
"Par le fait qu’a Goma bien des femmes n'ont pas d'occupations bien rémunératrices,
elles se font couvrir de quolibets à longueur des journées et ne doivent en
rien compter sur les petits cadeaux qui alimentent les liens entre les
conjoints, au nom de la parité !"
C'est ce que nous a affirmé Cécile, ancienne revendeuse de légumes au quartier
Birere, qui en a plusieurs fois été victime. Dans le cas où sa morale n'est pas
au bon fixe, une femme qui fait face à des situations similaires n'hésite pas à
se ressourcer dans le phénomène Kishakoshi. Ces cinq étapes constituent l'essentiel
de l'évolution du Kishakoshi jusqu' à son stade actuel.
A la ceinture dorée, préférer la belle renommée
Bien que les adeptes
du Kishakoshi se refusent de passer dans la catégorie des professionnelles de
sexe, ceux qui s'intéressent au phénomène sont d'accord sur le fait qu'il
s'agit incontestablement d'une prostitution voilée. Il semble que le scandale ne l'est concrètement
qu'une fois sa coquille percée, mais les conséquences du phénomène doivent du moins
réveiller les consciences.
Le Kishakoshi
charrie plusieurs partenaires sexuelles dans sa suite, qu'il remplace à sa
guise tels des biens substituables, les mêle à son vagabondage sexuel avant de
les noyer, au bout du compte, dans un professionalisme sexuel des plus
soutenus. Des mariages se dissolvent, des MST se transmettent à la volée, les
grossesses deviennent de plus en plus indésirables dans les entailles du
Kishakoshi ; son creux ne grouille visiblement que de fatalités.