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Dans un contexte où une nuit sans tuerie est la meilleure nouvelle de la
semaine, le moindre geste réparateur peut sauver des vies. C’est à cela que
s’applique l’activisme permanent de HEAL Africa dans la région de l’est de la
RD Congo. Le territoire de Beni, particulièrement, a été meurtri depuis
maintenant six ans. Terrifiantes tueries, des villages entiers vidés de leurs
habitants, des quartiers périphériques de la ville de Beni abandonnés par leurs
occupants de peur de se faire tuer, cela ne reste pas sans conséquences dans le
quotidien de la région.
Le centre-ville de Beni est devenu une sorte de réceptacle pour tous ces déplacés
redoutant les massacres dans leurs villages. La bonne partie des activités de
la ville ayant été relocalisées vers d’autres agglomérations, la vie n’en est
pas devenue plus commode pour toutes ces personnes nouvellement installées en
ville. C’est ce qu’illustrent ces propos amers de Nziavake N., déplacée
rencontrée à la base WAMAMA SIMAMENI de HEAL Africa en ville de Beni,
« J’ai perdu la moitié de ma famille dans le massacre perpétré la nuit du
07 au 08 Décembre 2019 à Kamango ».
Rescapées des tueries, ensuite déplacées. Et après ?
Les femmes et les enfants, au centre de l’activisme communautaire de HEAL
Africa depuis sa création, semblent les plus durement affectés par ces tueries
quasi-permanentes dans la région de Beni depuis Octobre 2014. Dans leurs
villages, ces femmes et enfants ont la possibilité de vivre de l’agriculture. Une
fois déplacées vers la ville, la société accorde plus d’opportunités à l’homme
qu’à la femme. Un ménage nouvellement installé en ville ne devient que plus vulnérable
lorsqu’il doit affronter les méandres de la vie sans son chef qu’elle a perdu
lors d’une tuerie récente, raison de leur déplacement.
Devant dorénavant porter le poids de sa famille sans le soutien de son mari
et, par-dessus tout, dans un environnement qui ne cède pas les rennes des
activités aux femmes, c’est tout un monde empreint de nouveaux défis
insurmontables auquel la femme fait face. D’un côté, elle porte le deuil de son
mari. De l’autre, elle doit être forte ou tout au moins le paraître pour ses
enfants dès lors orphelins de père. Cet état des choses tourne vite en une colère
qui approche la haine envers « l’espèce humaine dépourvue de tout trait
d’humanité », telle que l’a décrite Kasoki, une rescapée des tueries au
quartier Ngadi de Beni.
Par l’ergothérapie, rallumer l’aspiration des
femmes à un avenir meilleur
Par dizaines elles sont réunies dans différents auditoires selon le type de
métier qu’elles apprennent, ces femmes nouvellement devenues veuves, mères
devant affronter la vie sans leurs maris, jeunes filles enceintes des suites de
viols massifs par les assaillants. Leur idéal, acquérir une formation
vocationnelle devant constituer le moteur de leur nouvel élan vers une nouvelle
vie. Elles apprennent la couture, la tapisserie, la coiffure, l’art de banane
et bien d’autres métiers au sein de la cellule HEALING ARTS –Les arts qui guérissent–
de la base HEAL Africa de Beni-ville.
Rien n’égale la beauté d’un sourire illuminant un visage que l’on a vu éploré
la veille. Ces instants de joie partagée, cette expression de l’espoir retrouvé
constitue une réponse de gagnante pour ces femmes debout, prêtes à faire face
aux calamités dans lesquelles elles ont été plongées par les tueries.
35 ans d’âge, Mme Kaswera N. a perdu son premier mari en 2015, assassiné
pendant qu’il labourait le champ au village Mayangose, à une dizaine de
kilomètres de Beni. Remariée en 2018, son deuxième mari a été tué dans le
Triangle de la mort, vers le village Kamango. « La mort me semblait la
seule voie de sortie avant que je n’intègre HEALING ARTS au sein de la base
HEAL Africa de Beni. J’ai eu une assistance psycho-sociale qui a ravivé ma volonté
de survivre à la perte de mes deux maris méchamment assassinés », a-t-elle
confié à ses formateurs lors de l’obtention de son brevet à l’issue de son
apprentissage en coupe et couture.
Dans son activisme communautaire, HEAL Africa sensibilise également ces
femmes sur la question du genre lors de leur formation. Ce genre, qui charrie
les questions essentielles liées à l’état de vulnérabilité de tout genre, s’est
avéré essentiel pour beaucoup. Sourde et muette, Aline a été recrutée dans la
cellule HEALING ARTS de HEAL Africa Beni à l’âge de 17 ans. A plusieurs
reprises, son infirmité l’avait précédemment placée dans des situations délicates
l’exposant au viol.
La joie de sa tante maternelle, chez qui elle habite depuis qu’elle a perdu
ses deux parents dans les dernières tueries au quartier Ngadi de Beni, ne
pouvait être plus franche lorsqu’elle a sorti ces mots de remerciement,
« Vous nous avez rendu un service inouï en accordant à notre chère Aline
cette chance de devenir autonome par l’apprentissage de la couture. Par ces
nouvelles aptitudes qu’elle acquises, nous avons l’assurance que notre fille ne
court plus le danger de se faire violer par des inconnus qui la trouveraient
errante ».
Si nous n’avons pas la possibilité de mettre fin aux massacres de Beni,
nous pouvons tout au moins contribuer à la réduction de la souffrance des
veuves et des orphelins qui ponctuent son passage. Un geste charitable envers
ces nobles dames réunies au sein de HEALING ARTS dans la base HEAL Africa de
Beni, une assistance de tout genre, ou simplement un sourire compatissant lors
d’une visite peut leur réchauffer les cœurs. Merci donc de joindre votre effort
au nôtre et à celui de nos partenaires en agissant, à quelque niveau que ce
soit, en faveur de la réduction de la vulnérabilité de ces femmes et enfants
victimes des massacres de Beni.
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